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Contrats aidés : une remise en cause arbitraire et déplorable

Associations, syndicats et citoyens se sont rassemblés hier sur la Place de la Liberté pour protester contre la suppression d’un grand nombre de contrats aidés. Élu.e.s socialistes de Brest, nous nous joignons, évidemment, à cette mobilisation.

Le gouvernement justifie la suppression d’une grande partie de ces emplois par le fait qu’ils « seraient coûteux pour le contribuable » et auraient « une efficacité limitée en terme d’insertion professionnelle et de lutte contre le chômage ». Ces arguments s’appuient sur une lecture orientée des études du DARES, de l’OCDE et de la Cour des comptes, transformant des résultats partiels en certitudes [1].

Si les contrats aidés ne sont pas exempts de tout défaut, toutes les études à ce sujet – y compris celles des services de la ministre du Travail – soulignent qu’ils ont des effets foncièrement positifs. À court terme, les contrats aidés permettent de créer des emplois et d’insérer professionnellement des personnes éloignées du marché du travail. Sans ces contrats, ces personnes auraient très peu de chance de trouver un emploi. La direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP) conclut même que « les contrats aidés sont un des outils les plus efficaces pour diminuer à court terme le chômage ». À moyen terme, les chiffres sont encourageants : 41% à 67% des ex-contrats aidés ont un emploi six mois après la fin de leur contrat. Tout sauf insignifiant, 74 % des anciens bénéficiaires trouvent que le contrat aidé leur a permis de se sentir utile et de reprendre confiance.

De plus, les contrats aidés sont loin d’être l’outil le plus onéreux de la politique de l’emploi. Les exonérations de cotisations sociales coûtent, par exemple, bien plus cher. Supprimer une partie de ces contrats reviendrait à faire une économie d’environ 500 millions d’euros alors que l’Etat s’apprête à perdre 4 milliards d’euros de recettes en supprimant une bonne partie de l’ISF… Pour se décharger de toute responsabilité, le gouvernement a indiqué que « cette année, 293 000 emplois aidés seront signés contre 280 000 initialement prévus ». Depuis 2012, c’est autour de 450 000 contrats aidés qui sont financés chaque année. Avec 293 000 emplois aidés pour 2017, c’est 166 000 emplois de moins qu’en 2016 ! Le gouvernement « omet » de dire qu’il s’agit bel et bien d’un choix politique de ne pas vouloir maintenir le nombre de contrats aidés au même niveau que sous le mandat précédent [2].

Rappelons surtout que les contrats aidés sont socialement utiles. Une telle décision risque de mettre en faillite de nombreuses associations, de dégrader de nombreux services publics et implique de faire reporter la charge sur les collectivités locales, elles-mêmes en difficulté financière. Les associations directement impactées participent sur le territoire aux missions de service public : service à la personne, éducation populaire, insertion des jeunes et des moins jeunes (dont certains d’entre eux sont en réorientation professionnelle suite à de longues maladies ou des accidents de travail) etc. Quelle sera la réponse apportée par le gouvernement aux associations directement menacées par cette décision : « there is no alternative » ? Nous déplorons le manque d’intérêt des députés En Marche, qui brillent par leur absence sur le territoire, pour le sort de ces associations.

Cet arrêt brutal aura également des conséquences dramatiques pour les bénéficiaires qui essayent tant bien que mal de reprendre pied sur le marché du travail. Alors même qu’une grande partie des personnes concernées sont des femmes qui souffrent déjà d’une plus grande précarité sociale. Des associations et des demandeurs d’emploi ont cruellement appris la nouvelle le 9 août pour des contrats qui étaient censés commencer le 1er septembre !

Nous pensons qu’il aurait fallu engager un vrai débat au lieu d’agir dans la précipitation. Il n’est pas forcément absurde de réduire le nombre des contrats aidés si le chômage baisse mais, à l’heure actuelle, laisser plus de 150 000 personnes sur le carreau est inacceptable. Car ce qui est dramatique, c’est que la majorité présidentielle raisonne à coup de taux et de volume, comme s’il ne s’agissait que d’une ligne dans un bilan comptable. Derrière ces chiffres, il y a des hommes et des femmes engagés dans un parcours d’insertion qui, pour une grande partie d’entre eux, participent au service public, et ce dans l’intérêt de tous.

Notes

[1En effet, l’analyse de la Cour des comptes s’intéresse, logiquement, aux flux financiers et n’aborde nullement la question du parcours des personnes et ne peut donc que conclure à un coût élevé. Les analyses de la DARES donnent des indications utiles et nuancées mais cette dernière met en évidence les limites d’une évaluation complexe.

[2Chaque année, l’Etat prévoit le financement d’environ 300 000 contrats aidés (280 000 pour 2017). L’Etat accorde en général une rallonge de crédits en milieu d’année, permettant d’en signer 150 000 supplémentaires. Cette rallonge n’est donc pas inscrite dans la loi de finances initiale. Lorsque F. Hollande accordait 150 000 emplois supplémentaires en milieu d’année, E. Macron en accorde uniquement 13 000. D’où la forte baisse du nombre de contrats aidés.