La délibération a été adoptée à l’unanimité des voix issues des rangs de la gauche.
Sans surprise, la droite a préféré s’abstenir arguant, en substance, que s’il était terrible que des gens meurent, il n’incombait pas aux Brestoises et aux Brestois de contribuer financièrement aux opérations de sauvetage en mer. Chacune et chacun jugera de la qualité de cet argument.
Pour nous, élues et élus socialistes, la logique en faveur de laquelle opter est évidemment tout autre. Au moment de notre vote, plusieurs collectivités de France avaient déjà pris la décision d’attribuer une subvention de fonctionnement à des ONG comme SOS Méditerranée, qui sauvent les vies que d’aucuns préfèrent ne pas voir mais que nous, habitantes et habitants d’une ville considérablement marquée par l’océan, d’un territoire tout aussi considérablement marqué par l’héroïsme des sauveteurs en mer de la Société nationale de sauvetage en mer, savons qu’il faut prendre en considération.
La situation est très claire : les migrantes et les migrants sont des êtres humains qui fuient la misère, les conflits, les persécutions. Ce sont des êtres humains qui recherchent la dignité : la dignité car l’exil est toujours un traumatisme ; la dignité car prendre le risque de la noyade pour survivre est toujours un traumatisme ; la dignité car la fraternité est une part incontournable de notre devise. Enfin, la dignité car si vivre en France, à Brest de surcroît, est un privilège, la lucidité vis-à-vis de notre propre histoire nous pousse à concevoir combien la liberté est fragile.
Car ici même, il n’y a pas quatre-vingt années, on se cachait des bombes.
Ici aussi, on partait.
Ici aussi, on avait peur.
Ici aussi, enfin, on avait envie d’un autre monde, on rêvait d’une vie et d’une liberté nouvelles.
Alors 10 000 euros de la ville de Brest pour pour contribuer à la lutte contre la constitution d’un charnier aux portes de l’Union européenne, c’est non seulement un geste de solidarité qu’il convient d’affirmer - d’assumer, même -, mais c’est aussi une part du travail que l’État est supposé entreprendre. Tâche qu’il n’entreprend malheureusement pas, comme nous le savons trop bien, au regard des dizaines de milliers de morts en mer Méditerranée, chemin migratoire le plus meurtrier dans le monde.
Si ce n’est de la négligence ou même de la non-assistance délibérée à l’égard d’individus en grand danger, nous pensons que c’est au moins de l’attentisme. Cette subvention à une ONG portant haut nos valeurs d’égalité, pour les naufragés ainsi que pour celles et pour ceux qui tentent de les sauver, c’est donc la démonstration de notre solidarité.
Depuis Brest, le message que nous voulons transmettre est donc simple : aucun être humain ne doit mourir noyé. La solidarité ne se décrète pas mais s’opère, et fait la grandeur de la France, d’autant plus quand elle est portée par ses collectivités.
C’est le message que nous avons désiré porter, et c’est la raison pour laquelle le groupe des élues et élus socialistes a voté cette importante délibération.